A t’on enfin trouvé un manuel d’histoire féministe ?

L’image des femmes a-t-elle évolué dans ces manuels ? Elles y restent toujours aussi rares, entre 5 et 10% des documents présentant des personnages dans trois des quatre manuels de seconde publiés cette année. Le livre, L’histoire fabriquée ?, signalait qu’on ne trouvait dans les manuels de 2010 aucun exemple de femme de pouvoir ayant vécu au Moyen Age. En 2014, on a discrètement réglé le problème dans trois manuels sur quatre en citant des femmes exerçant les pouvoirs de la seigneurie, mais sans le signaler aux élèves et en oubliant toujours Aliénor d’Aquitaine ou Blanche de Castille.
Un manuel se distingue par son « féminisme » en donnant 28% de documents contenant des femmes. On y trouve, une mendiante, des corporations féminines, les lais de Marie de France chantant l’amour courtois et passionnel ainsi qu’un chevalier chaste parce qu’il se contentait d’une union légitime.

femmes moyen age manuel histoire féministe genderCes beaux exemples ce que les études de genre peuvent donner de plus intéressant sont malheureusement gâchés par deux pages relevant de l’idéologie du Gender. On y trouve Eve, des sorcières, puis une vierge à l’enfant et des exemples de chasteté avant de demander aux élèves pourquoi ce modèle est « inatteignable pour les femmes ». (Nathan Cote pp98-99).
Extrait légèrement modifié d’une chronique publiée dans le numéro de septembre/octobre de la Nouvelle revue d’histoire

Enjeux historiques, culturels et religieux du soutien aux minorités irakiennes

Extraits de deux articles de Vincent Badré publiés dans la presse :

Libération : Pourquoi intervenir en Irak ? 
[Contre le déracinement du monde]

Pourquoi se soucier du sort des Yézidis, des Shabaks, des Mandéens et des chrétiens Chaldéens et Syriaques ? C’est une manière de résister concrètement à la tentation du «choc des civilisations». L’Etat islamique détruit le «tombeau de Jonas». Il s’attaque aux monuments et aux groupes culturels et religieux qui témoignent de la complexité de l’histoire de l’Irak. En prétendant revenir à la pureté des origines de l’islam, il participe à la construction d’un monde contemporain totalement coupé de ses racines historiques.
[Retrouver des sources d’idées et la parenté des cultures]
Est-ce pourtant si grave de voir brûler des vieux manuscrits et disparaître quelques très vieilles religions ? C’est la destruction de réserves de poésie et d’inventivité humaine, c’est aussi la disparition des traces de notre parenté culturelle avec le monde arabe. Notre époque est tentée de ne voir que ce qui nous sépare du monde musulman, en oubliant qu’il s’est aussi nourri de sources souvent communes tout en les transformant autrement. Le philosophe grec Aristote a été traduit et lu avec passion sur les rives du Tigre et de l’Euphrate avant de parvenir sur celles de la Seine. Retrouver des chemins de rencontre peut passer par la conscience de cette parenté culturelle. Les cultures peuvent aussi se rencontrer dans la redécouverte de leurs racines, à condition qu’elles n’aient pas été coupées.
[Des racines vivantes]
Parmi les leçons de vie, de joie et d’hospitalité que j’ai reçues en Irak, je retiendrai aussi le témoignage d’un rapport joyeux et décontracté entre les racines historiques. Nous étions devant la porte fermée du tombeau de Saint Behnam, près de Qaraqosh ; l’un des prêtres présents reprend en rigolant un chant sacré où Saint Pierre avoue qu’il a perdu les clefs du paradis, et un autre sort son portable pour qu’on aille chercher la clef. Cet épisode montre un patrimoine qui n’est pas un objet mort oublié dans un musée, mais qui reste une école d’humanité.

La Croix : Enjeux du soutien aux Chrétiens d’Orient :
Les souffrances des Irakiens sont une occasion de ne pas opposer les solidarités. Elles font se retrouver des gens qui viennent d’horizons politiques et spirituels différents, qu’il s’agisse de ceux qui se soucient des chrétiens, de l’indépendance des Kurdes ou des minorités oubliées et isolées comme les Yézidis, les Chabaks ou les Mandéens, mais aussi de ceux qui pensent aux souffrances des Irakiens sunnites et chiites. [ …]
La culture des chrétiens d’Orient peut aussi nous donner des exemples de vie avec un patrimoine et des traditions vivantes. Ils peuvent recouvrir de très anciens monastères de marbres neufs et se passionner pour la finesse psychologique des manuscrits anciens.
[Liturgie entre beauté ancienne et moderne]
Ils pouvaient aussi faire alterner dans une messe au village de Bartella des chantres traditionnels, enfants et pères de famille réunis autour de leurs lutrins, et une chorale moderne entonnant un chant de sortie sur l’air de « Ce n’est qu’un au revoir mes frères ».
[Charité]
En rencontrant les chrétiens d’Orient on découvre aussi de fragiles floraisons de la grâce et de l’espérance. Les missions humanitaires de l’association Fraternité en Irak nous ont permis de découvrir les projets d’aide et de prière de Sœur Amira, une énorme fête autour d’une association de handicapés, des « moines dans la ville » ou de beaux mariages. [ …]

L’histoire au Journal de 20 heures sur France 2 : La déshumanisation.

Quelques images, un mot entendu en passant, et une des grandes tendances de l’enseignement actuel est mise en images dans un reportage pour France 2. Le professeur montre une gravure de guerre. Il souligne la déshumanisation des soldats dans les tranchées.

Cette perte de substance humaine ne touche pas que les « poilus ». Elle peut aussi toucher un enseignement de l’histoire qui devient partiel. Il ne montrant plus clairement les diverses motivations des soldats et peine à présenter les « héros » qui luttent pour lutter contre une injustice ou pour obtenir une conquête sociale.

Les économistes des manuels d’histoire : majoritairement keynésiens ou socio-démocrates.

Dans le chapitre sur la « gouvernance économique mondiale » des manuels actuels de terminale, sur 49 documents consacrés à des économistes, on trouve 11 images, textes ou biographies de Keynes, 6 des architectes du système financier d’après guerre Morgenthau et Dexter White, 5 de Joseph Stiglitz, 8 de (néo)libéraux comme Reagan ou Thatcher, 2 d’altermondialistes contre 2 de soutiens du FMI et 10 de conseillers ou de proches de dirigeants de gauche modérée : Clinton, Obama et dans un manuel : Jacques Mistral, Dominique Strauss Kahn et Jacques Attali, Pierre Jacquet, Jean Pisani Ferry, et Laurence Tubiana qui ont été conseillers respectivement de Lionel Jospin, Jacques Delors et Lionel Jospin.

Un seul manuel se distingue en donnant la parole à d’autres économistes comme Paul Krugman et Nouriel Roubini et en organisant son propos autour d’une critique par Maurice Allais des excès de l’endettement et de l’économie financière développée par Alan Greenspan. [pour aller plus loin, voir les chapitres correspondants dans L’histoire fabriquée ?, toujours disponible en librairie].

Image : Keynes et Morgenthau.

Vallaud Belkacem, les manuels et l’homosexualité, au risque d’oublier l’histoire

Le ministre de la condition féminine estime qu’il faut « passer en revue » les manuels scolaires à propos de l’homosexualité, dans un entretien au magazine Têtu. « Aujourd’hui, ces manuels s’obstinent à passer sous silence l’orientation LGBT (lesbienne, gay, bi et trans) de certains personnages historiques ou auteurs, même quand elle explique une grande partie de leur oeuvre comme Rimbaud »

Son constat est juste. Les manuels d’histoire ne parlent jamais d’homosexualité.
En fait ils ne parlent jamais de sexualité en général. On ne signale pratiquement jamais dans les manuels si les personnages évoqués ont une vie sexuelle quelconque et si cela a joué un rôle dans leur vie.

Le risque de l’enquête qu’évoque le ministre de la condition féminine pourrait être de mener à une déformation des travaux des historiens et a des anachronismes massifs.
Les gestes de Rimbaud ou ceux qu’on peut voir sur bien des céramiques grecques de l’antiquité n’avaient pas forcément le sens que la communauté homosexuelle actuelle peut leur donner.
« Pour les Grecs anciens, le terme de pédérastie désignait des relations amoureuses sans nécessairement être sexuelles entre un ou une adulte et un adolescent. L’historien Bernard Sergent y voit un élément de rites aristocratiques de passage à l’âge adulte. Pour l’essayiste Jean-Claude Guillebaud, la Grèce n’était pas pour autant un monde de liberté sexuelle qui aurait ensuite été détruit par le puritanisme chrétien. Les tabous antiques n’étaient ni ceux de la Bible, ni les nôtres. L’historien Paul Veyne affirme que les païens de l’Antiquité n’ont pas « vu l’homosexualité d’un œil indulgent » car ils ont laissé des textes qui critiquent des relations sexuelles entre personnes de même sexe, mais « ils ne l’ont pas vue comme un problème à part », car la notion d’homosexualité n’existait pas. Les tabous de l’époque leur faisaient par contre considérer que le fait pour un homme libre, être un partenaire passif était une honte sans appel. » (Histoire fabriquée pp 29-30)
Il faudrait qu’il soit possible d’avoir une vision nuancée et plurielle des travaux historiques menés sur le caractéristiques et les identités des hommes et des femmes. Aboutir à une véritable connaissance de cette histoire serait certainement plus constructif pour les élèves et plus respectueuse de la réalité, de leurs opinions et de leurs choix personnels.

L’histoire Fabriquée ? sur France Inter 5 7 de Laurence Garcia 15 09 12

Comment conjugue-t-on le verbe « rêver » au passé simple, au présent impatient et au futur incertain ?
C’était mieux avant ou ce sera mieux demain ? Voilà pour le programme de notre assiette anglaise du petit matin.
 « L’histoire fabriquée ? Ce qu’on ne vous a pas dit à l’école », c’est le dernier pavé dans la mare de l’Histoire, signée Vincent Badré. Et il connaît bien son sujet, ce prof d’histoire géo qui s’attaque à la bible de l’historien : le fameux manuel. Des manuels trop politiquement corrects qui ne disent pas toujours toute la vérité. Voilà pour l’invité polémique à 6h20.
A écouter ici, et là :

avec une dédicace spéciale pour Grace Hopper, informaticienne et contre amiral de la marine américaine

Femme d’action et d’influence; c’est presque femme des années 80 et général d’infanterie que chantait Sardou.